Vous et moi

Je suis épris solidement
Je suis emprisonné volontairement
Je suis conquis sans bataille
Je suis ému sans rire et sans larme


Je ne sais pas d'où je viens
Je ne viens plus là où je sais
Ne reste alors que moi, ne le dîtes pas
Que moi de vous à moi


Mais quel est donc ce moi ?
Un triomphe monstrueusement grotesque ?
Une légitimité aux bords de ses propres lois ?
Ni l'un ni l'autre ; simplement une chute qui stagne


Qu'ai-je, mais qu'ai-je de si horrible
Pour que vous m'ignoriez à ce point-là ?
Je vous aurais dit cent fois la vérité,
Et tandis que d'autres vous racontent les contes
Des mille et un bobards, vous oseriez donc les croire ?


Rares sont les fêlés cloîtrés pouvant apprécier la vie
Je le dis bien fort, et sans amalgame : la vie est jolie
Après tout, vu du gibet, le pendu n'aurait que trop d'espoir
Et ce pendu danse pourtant dans le vent chaque soir


Je ne reviendrai pas du royaume des morts
Cependant que je ne connais pas vraiment le royaume des vivants
Non que la vie ne m'intéresse pas, au contraire,
Elle m'intéresse, mais je ne suis pas preneur de chiens en liesse